Ville sans bidonville

Maria ALBEROLA


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Née au Maroc je suis arrivée en France en 1986 à l’âge de six ans En 2009 je retrouve ma terre natale. J’y vais pour combler des vides. Durant ce séjour je vais être frappée par la présence d’un bidonville, sous mes fenêtres, en plein centre de Casablanca. Je décide de m’y rendre. Mohamed, Saida, Fatema, et les autres m’ouvrent les portes de leurs habitations de fortunes. Ils vivent dans ce bidonville vieux de 40 ans car tout les lie à Casa, l’école, le travail. Ils y fondent des familles et ont même construit une mosquée. La ville souffre du manque de logement, c’est pourquoi ils vivent ici. Un évènement vise à tout changer. Un programme de résorption des bidonvilles de centre urbain. A partir de ce moment, mon intérêt pour cette population de «bidonvilliens» ne va cesser de grandir. Intriguée par la promiscuité entre bidonvilles et logements formels en plein centre ville, soucieuse de la condition et de l’avenir de ces gens, je décide de me documenter afin de réaliser ce reportage. Problématique : Casablanca compte plus de 400 bidonvilles et ce n’est pas un cas isolé. Depuis des décennies au Maroc, l’accroissement de la population urbaine augmente régulièrement à cause de l’exode rural. La construction de logements est insuffisante par rapport à l’évolution des besoins. Au cours des 20 dernières années l’habitat insalubre s’est développé à un rythme plus rapide que le logement formel. Le développement des bidonvilles est l’expression la plus significative des problématiques que peut entrainer une croissance économique constante. Dans un pays en développement, le mot bidonville est assimilé au fait de vivre dans un logement de fortune et non à une situation de pauvreté extrême. La plupart habitent un logement clandestin parce qu’ils ne trouvent pas sur le marché une offre leur correspondant. En 2004, le royaume du Maroc s’est engagé dans une nouvelle action de résorption des bidonvilles au travers du programme « Ville Sans Bidonville ». À cette date 5 millions de citoyens logent dans des habitations insalubres. L’objectif de VSB est d’éliminer en sept ans (2004-2010) tous les bidonvilles des centres urbains du pays par le biais de relogement, de recasement ou de restructuration. En 2010, soit cinq ans après la mise en œuvre de VSB, seulement 37 villes sur 83 ont été déclarées sans bidonvilles. L’objectif n’est pas atteint malgré de grandes réalisations. En effet il est difficile de mobiliser suffisamment de foncier pour les ménages actuellement concerné par le programme VSB. Aujourd’hui le logement informel est devenu plus performant que le formel dans sa rapidité de production. Les lotisseurs illégaux ainsi que la vente illicite de matériaux de construction additionnée au savoir faire local facilite le développement et le maintient des bidonvilles. La contribution du secteur bancaire au financement du logement est limitée. Combien même un système financier adapté existerait, il ne pourrait s’adresser aux foyers à faible revenus et ne résoudrait pas l’insuffisance de production formelles. Enfin, la croissance et l’exode rural sont des données croissantes encore à l’heure actuelle. L’année 2012 est aujourd’hui la date limite que s’est donné le programme pour parvenir à ses réalisations. Par ce travail je souhaite illustrer les conditions de vie dans le bidonville, mais aussi ce qui fait de ces gens des casablancais au même titre que les autres (Quotidien, travail, scolarité, loisir, religion). Faire le récit de la vie de ces familles, actrices et victimes de la croissance du pays. Casablancais en sursis à cause du programme qui vise à les déloger. Marginaux aux yeux de leurs concitoyens, enjeux économique et social du gouvernement, je souhaite poser sur eux un autre regard. Rendre hommage à ces hommes et femmes, dont la qualité de vie, souffre de la bonne santé du pays.

 

Country : Maroc
Place : Casablanca

Number of photos : 35