Un royaume en péril

Emmanuel BLIVET


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Ancien protectorat britannique contre la poussée zouloue au XIX siècle, le Lesotho acquis son indépendance en 1966. Cette monarchie constitutionelle de 2 millions de sujets grande comme la Belgique, appelée le « royaume dans les nuages », est le seul pays au monde dont l’altitude minimale dépasse les 1400m. Ses chiffres sont terribles : 200000 orphelins du Sida, ¼ de la population est atteinte du VIH même si les traitements rétroviraux se multiplient, l’espérance de vie est tombée à 34 ans et, une première en Afrique, les décès sont sur le point de dépasser les naissances. Il faut ajouter à cela une sécheresse chronique depuis cinq ans ; un tiers des puits du pays sont à sec alors que le pays assure, grâce à ses réserves et au prix de barrages pharaoniques, l’approvisionnement en eau de son immense voisin l’Afrique du Sud en échange, à l’origine, de maïs, dont la production a chuté ces dernières années ou fut remplacée par des biocarburants.

 

 

 

Les seuls produits exportés sont la laine et le mohair . Comment survivre dans ces conditions ? une perfusion internationale et un réservoir de main d’œuvre pour l’Afrique du Sud depuis l’appartheid dont les envois de fonds constituent 40% du PIB. Seulement voilà, depuis le 1er juin, les laisser-passer temporaires pour aller travailler comme mineurs ou domestiques ne sont plus délivrés, et le temps d’attente d’obtention d’un passeportpeut prendre quelques années. Les milliers de travailleurs frontaliers sont aujourd’hui contraints de rester au Lesotho ou de franchir clandestinement la frontière. La nouvelle usine de taille de diamants n’a pu absorber la main d’œuvre congédiée. Même l’industrie textile, un temps sauvée de la banqueroute, voit à nouveau son avenir en noir ; les conditions de travail se détériorent et la production du Lesotho risque de ne plus être compétitive avec le Bangladesh ou autre Cambodge avec la possible remise en cause des accords de l’AGOA . Depuis mai dernier, une pétition (environ 40000 signatures) circule dans le pays, demandant à ce que le Lesotho soit rattaché à son immense voisin. Vuyani Tyhali, syndicaliste et fondateur du Mouvement de la Charte Populaire du Lesotho explique que son pays « n’est pas simplement enclavé, mais qu’il est vérrouillé par l’Afrique du sud ; Il n’y a aucune raison pour que nous continuons à exister en tant que pays ayant sa monnaie et son armée » ( The Guardian. Juin 2010). Malgré leur attachement à leur culture, peu de Basothos sont attachés à leur Parlement, chaotique, ou les tentatives d’assassinat et les grèves se succèdent entre les scrutins contestés. En revanche, beaucoup de basothos comptent sur la bienveillance de l’Etat Sud-Africain ; Le congrès national africain, l’ANC, a été crée au Lesotho en 1912 par le roi Letsie II, et du temps de l’Appartheid, la branche armée de l’ANC organisait ses actions de guerilla à partir de cette enclave. Le roi Letsie III et son régime accepteront-t-ils d’étudier le problème ou sommes nous aujourd’hui face à une menace de conflit interne ? 

Country : Lesotho

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