Darfour


Stéphanie RIVOAL



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Pour ne pas dire ” on ne savait pas “.

Samuel Le Bihan est administrateur d’Action contre la Faim. De retour d’une visite des programmes au Darfour en janvier 2007, il témoigne :

“Dans l’avion qui survole Khartoum, à travers mon hublot, je vois le Nil qui découpe l’immensité, étincelant comme un sabre jeté sur le sable. Surgie du désert, la ville se dévoile en bas-relief dans un éventail de couleurs rouge et ocre, entaillé par des ombres profondes et régulières. Ce sont mes premières images du Soudan.

Quelques jours et des épreuves administratives plus tard, je suis à El-Fasher dans le Nord-Darfour avec l’équipe d’Action contre la Faim. L’accueil est chaleureux et professionnel. On aborde vite les problèmes de sécurité car la situation s’est terriblement dégradée ces derniers mois. De plus en plus d’«internationaux» sont pris pour cibles, ce qui ne s’était jamais vu au Darfour, même dans les moments de tension extrême. Les incidents se multiplient avec une fréquence alarmante et la position des humanitaires est devenue critique, pour ne pas dire dangereuse.
La veille de mon arrivée, dans la ville de Nyala un groupe de policiers a surgi lors d’un dîner qui réunissait plusieurs ONG, des membres des Nations unies et des personnes de l’Union africaine. Sous un prétexte grotesque, ils ont pillé et passé à tabac avec une violence inouïe toutes les personnes présentes et particulièrement les femmes, allant même jusqu’à des violences sexuelles.
En décembre 2006, l’équipe d’Action contre la Faim du camp de déplacés de Gereida avait également été attaquée, mais cette fois par des individus non encore identifiés à ce jour, et avait subi les mêmes violences. Cet événement les a contraints à quitter les lieux.

La situation s’est dégradée car les accords de paix de mai 2006 ont fini de diviser les différents groupes rebelles qui combattent au Darfour, morcelant un peu plus un conflit déjà très complexe. Ces groupes se sont littéralement «atomisés» en une multitude de factions indépendantes, opposées et incontrôlables. Dans ce paysage de tensions, les leaders d’hier n’ont plus de crédibilité et les nouveaux responsables avancent masqués. La situation des combats est devenue extrêmement complexe et imprévisible. Les informations ne sont pas fiables et la sécurité des personnels humanitaires, internationaux ou soudanais, presque impossible à assurer. (…)

L’ouvrage que vous découvrez est un témoignage du terrain. Écrit, ressenti, vécu par Stéphanie Rivoal partie travailler dix mois auprès des populations du Darfour.
À travers ses récits mais aussi, et peut-être surtout, ses photos, elle nous livre une parole qui résonne au plus profond de nous.”

“Demain, je pars pour le Darfour. Pour une mission d’un an. J’ai droit à 20 kilos de bagages et j’en ai déjà 5 de livres, d’appareils photo et de pellicules. Action contre la faim m’a briefée sur la situation humanitaire, la sécurité, les programmes en cours. Je suis prête. En théorie. Mais, je n’ai jamais travaillé pour une ONG, encore moins dans un contexte de guerre. Émotionnellement, il va sans doute falloir que je me blinde. Je vous promets de vous écrire de là-bas. Je vous raconterai ce que je vois, ce que je vis, ce que je ressens. Être une humanitaire sur le terrain, après tout, c’est ce que je voulais, non ? J’ai un peu peur de ce qui m’attend. J’espère être à la hauteur.” Stéphanie



Editor : LE CHERCHE MIDI
Publication year : 2007
Number of pages : 216
Language : Français
ISBN 13 : 978-2749109664