…Peter Turnley a commencé à photographier en 1972. Avec comme but initial l’idée que la photographie permet le partage. "La photographie, à sa base, est pour moi surtout un moyen de partager. L’appareil n’est qu’un outil qui me permet de partager les réalités, les émotions, et les sentiments que je vois et ressens à travers tout ce dont je témoigne et j’observe".Mais que voulait dire partager en photographie pour un adolescent, vivant dans un État conservateur comme l’Indiana? Par chance la famille de Peter Turnley était progressiste, engagée même dans la lutte pour les droits civiques. Cela signifie que pour lui, partager, c’était à cette époque s’engager contre la guerre du Viet Nam, lutter pour les droits civiques, soutenir le féminisme, faire évoluer ce "rêve américain" d’où les désavantagés sont exclus.Il se trouve que les aléas de la vie ont permis à Peter Turnley de mettre en pratique cette réflexion et ces principes. Très investi dans les pratiques sportives, notamment le football américain, un accident le cloua au repos forcé et pendant sa convalescence, ses parents, heureux hasard, lui apportèrent "Visage d’Asie" d’Henri Cartier-Bresson. Ce fut le déclic, privé de sport il allait photographier tous les soirs, après la sortie de l’école, dans les quartiers noirs ou hispaniques ou les travailleurs blancs. La photo devenait prétexte pour découvrir un nouveau monde, elle me procurait également un moyen de parler en partageant avec les autres ce que j’observais. Tout au long de ces quatre décennies, j’ai pu constater que "le verbe partager est sous-utilisé dans notre vocabulaire collectif car dans pratiquement tout partage, il y a une notion d’amour. Ainsi, il a toujours été clair pour moi que les personnes ou les thèmes de la vie que je photographie sont plus importants que la photographie elle-même. J’utilise la photographie comme un moyen d’attirer l’attention sur le sort de ceux qui sont en grandes grandes difficultés ou souffrent de graves injustices."Essayer de faire quelque chose pour que le monde soit meilleur, tel est le précepte de base qui a conduit sa façon de photographier. Après les petits reportages locaux, il a à la fois nourri enrichi son moyen d’expression en découvrant et en se nourrissant du langage d’autres photographes. Tels, l’école humaniste française (Doisneau, Ronis, Cartier-Bresson, Boubat…), Les écoles américaines qui se sont appuyées sur les images pour dénoncer les injustices sociales et faire changer les lois (Jacob Riis, Lewis Hine, la FSA avec Dorothea Lange et Arthur Rothstein) ou des photographes comme Robert Capa ou W. Eugene Smith qui furent des modèles…