FRANK HORVAT, PARIS


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«Au moment où j’y mis le pied pour la première fois, Paris était pour moi la capitale du monde. De celui de la mode bien sûr, mais aussi de la peinture, des lettres, des spectacles et surtout – dans ma perspective – du photojournalisme, car c’était le siège de Magnum.» Frank Horvat découvre Paris en 1951. Alors qu’il est chargé de réaliser une série de mode pour un magazine italien, le jeune photographe s’assigne une mission supplémentaire : rencontrer Cartier-Bresson. «Je me souviens de ce mois de juillet 1951 comme d’une progression triomphale : j’assistai à la première collection de Givenchy, au bal de Fath (le rival de Dior), je fus reçu dans les rédactions de Paris-Match et de Réalités (qui gardèrent certaines de mes photos), je fis le portrait de Maxime de la Falaise, égérie de l’intelligentsia parisienne, dans son boudoir de l’Île Saint-Louis. Je me disais que cette escalade ne pouvait qu’aboutir au bureau place Saint-Philippe du Roule, où Cartier-Bresson, tous les mercredis à 10 heures, recevait des jeunes photographes et où il m’aurait certainement invité à rejoindre sa pléiade.» Henri Cartier-Bresson et l’agence Magnum – que ce dernier crée en 1947 à New York avec Robert Capa, David Seymour, Maria Eisner, William et Rita Vandivert – incarnent une photographie, et davantage peut-être, un mode de vie, auquel le jeune Horvat aspire : parcourir le monde, étancher sa soif de réel. L’admiration pour Cartier-Bresson résistera à cette première rencontre, en 1951, lors de laquelle le «maître» laisse peu d’espoirs au jeune aspirant disciple : «Vous travaillez au 6×6? Le Bon Dieu ne vous a tout de même pas mis les yeux sur le ventre ! Et au flash? C’est une intervention arbitraire ! Et en couleur ?» et retournant ses tirages pour considérer la composition des photographies, il achève : «Vous n’avez rien compris. Allez donc au Louvre et étudiez les compositions de Poussin.» Frank Horvat, toute sa vie durant, et quand bien même il prendra les libertés qu’il estime nécessaires face au dogme, distinguera cette rencontre comme la plus décisive dans son parcours de photographe. En 1955, il quitte Londres pour s’installer à Paris. Il rejoindra bien Magnum pour une courte durée (de 1960 à 1962) ; l’agence tolérant peu ses incursions jugées trop nombreuses dans le champ de la photographie de mode, forme pervertie aux yeux des tenants de la photographie témoignage.

Né en 1928 en Italie, contraint à l’exil par le régime fasciste italien et ses lois antijuives, Frank Horvat passe son adolescence en Suisse avant de prendre le chemin du monde, un appareil à la main. Paris sera l’une de ses premières escales. Il y fera la rencontre décisive, en 1951, d’Henri Cartier-Bresson. Viendront le Pakistan, l’Inde, Israël, la Jordanie puis Londres, sujets de ses premiers reportages, objets de ses premières publications dans la presse. S’installant à Paris en 1955, âgé de vingt-sept ans, c’est en photoreporter qu’il abordera la ville. L’histoire de la photographie – et plus largement, des représentations – est marquée par ces déplacements contraints ou volontaires, ces regards exilés. Qu’est-ce qu’un jeune homme qui a grandi dans les montagnes suisses et sillonné l’Inde, perçoit de Paris ? Quel imaginaire projette-t-il dans la silhouette de la cité ? Comment va-t-il investir les parts d’ombre et de lumière de la ville pour en faire image à son tour ? Disparu en 2020, Frank Horvat a constitué une œuvre abondante. La présente exposition s’attache au corpus parisien réalisé au cours des années 1950. Associant reportages et séries de mode, elle révèle une ville prise entre ruelles d’un siècle passé et grands ensembles de demain, entre sites mythiques et coulisses interlopes. On y croisera des amants en bord de Seine, Anna Karina en robe Chanel au milieu des Halles, des passants anonymes sur des trottoirs bondés et Frank Horvat, fasciné par «la magie de la boîte », cheminant entre foule et individu à l’affût d’instants d’intimité que le vertige urbain dissimule si bien.

Exposition réalisée en collaboration avec le Studio Frank Horvat

photographs by Frank Horvat

Entrée libre
From 01/04/2023 to 02/09/2023
Centre photographique Rouen Normandie
15 rue de la Chaîne
76000 Rouen
France

Opening hours : du mardi au samedi de 14h à 19h, sauf jours fériés
Phone : +33 (0)2 35 89 36 96
info@centrephotographique.com
www.centrephotographique.com