MÉTAMORPHOSE


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2010 / 2016

Cette série  est extraite d’un projet éditorial comprenant plus d’une centaine de photographies, constituant  un parcours photographique sur les traces laissées par l’Homme, des paysages façonnés par les activités humaines, et en constante évolution depuis la création de l’outil industriel.

Des entreprises, des exploitations se sont créées et  ont parfois connu des périodes d’activité intense et glorieuse. Des hommes et des femmes y travaillaient, et faisaient vivre leurs familles. Et puis un jour, tout s’est arrêté. Un décès, le départ à la retraite d’un chef d’entreprise, un changement de propriétaire, la crise, les marchés qui s’effondrent, une rentabilité insuffisante,  ont contraint des entreprises à fermer. Les lumières se sont éteints, les machines se sont tues. Les femmes et les hommes ont déserté les bâtiments. Tout ce qui était récupérable a été retiré et revendu pour ne laisser que des bâtiments vides qui ne sont plus entretenus. Ils se dégradent rapidement. La végétation y prolifère de façon anarchique. Cependant, l’activité humaine n’a pas complètement disparu. Des graffitis envahissent les façades et les vitrines, leurs auteurs prenant parfois possession des lieux. Des objets abandonnés sur place laissent deviner des occupations éphémères. Certains équipements ont fait partie du paysage pendant plusieurs dizaines d’années. Ils ne fonctionnent plus, mais ils sont toujours là pour témoigner de l’histoire d’une activité industrielle florissante maintenant révolue. C’est le cas de ces grandes cheminées d’usine qui émergent de terrains vagues. Elles crachaient autrefois leur fumée noire au temps du charbon et de la vapeur. On rencontre également d’anciennes lignes de chemin de fer dont l’exploitation commerciale a cessé. Certaines sont reprises en main par des associations qui les font revivre. Des petits trains sont réhabilités et fonctionnent à nouveau, chargés de touristes, à qui on raconte les belles histoires du passé. En se déplaçant dans la nature, on s’aperçoit qu’il est de plus en plus difficile de photographier un paysage ne comportant aucune trace de l’homme.  Des objets divers et variés traînent un peu partout, abandonnés sur place après utilisation. Même en plein désert du Sahara, il n’est pas rare d’avoir l’oeil attiré par des présences insolites.  Cela peut être une carcasse de voiture, un pan de vieux mur près de s’écrouler, des morceaux de canalisation en béton ou bien des éléments plus légers transportés par le vent, comme ces morceaux de sacs en plastique accrochés aux branches.

Mais, si les engins de démolition donnent souvent  le coup de grâce en faisant place nette pour libérer du terrain constructible, parfois un nouveau destin, une nouvelle vie sont réservés à ces constructions abandonnées. D’anciens sites industriels sont complètement rasés pour faire place à des activités différentes. Des architectes ingénieux exploitent les structures existantes pour reconstruire des bâtiments entièrement repensés. Les technologies et les matériaux modernes sont largement utilisés pour leur donner un design novateur et surtout de bonnes performances énergétiques. Une autre vocation attend ces entrepôts, ces usines, ces manufactures. C’est le cas à Arles, par exemple, pour les anciens ateliers de maintenance de la SNCF. Ils sont transformés année après année pour devenir un grand lieu d’exposition, accueillant chaque été les fameuses rencontres photographiques.  Le visiteur a le plaisir de la nouveauté, mais la mémoire du lieu reste vivante.

Photographies YVERGNIAUX Jacques