SOUL OF THE CITY


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La Galerie Rouge présente une exposition personnelle de la photographe et vidéaste Martine Barrat. Soul of the city a pour thème un des sujets principaux de son oeuvre : New York et ses habitants. Arrivée dans cette ville en 1968, Martine Barrat va rapidement filmer puis photographier des personnes qu’elle croise au sein des quartiers du Bronx et d’Harlem. Son regard, loin d’être uniquement documentaire, est porté par un engagement total vis à vis des personnes qu’elle photographie et dont elle partage bien souvent le quotidien – l’aspect participatif et collectif étant une dimension fondamentale de son oeuvre. Chaque scène, personne ou geste enregistré sur la pellicule est une célébration de la vie et des relations humaines. La rue, ses règles et ses modes de vie, devient sous le regard de Martine Barrat un monde à part entière, joyeux et grave en même temps, fait de luttes et de bonheurs, que l’on a envie d’explorer. Artiste aux multiples vies, Martine Barrat a toujours revendiqué une grande indépendance dans sa vie comme dans son oeuvre. L’exposition s’articule autour de différentes séries et points de vue sur New York.

Une sélection de ses premières photographies du South Bronx des années 1970 est d’abord présentée. Au début des années 1970, Martine Barrat commence en effet à filmer de manière collaborative et participative les membres des gangs du Bronx, quartier complètement abandonné par la municipalité de New York. En 1976, alors que sa caméra lui est dérobée chez elle par un voisin, le chef du gang des Roman Kings, Pearl, lui offre son premier appareil photographique. Elle commence à photographier de manière rapprochée, presque cinématographique, les corps et les gestes des habitants du quartier. Plutôt que de photographier la pauvreté et la violence qui existent dans le South Bronx, Martine Barrat met en avant la beauté de ses habitants, l’amour qui unit les couples, la joie des enfants qui jouent et trouvent de la fraîcheur les jours de canicule dans des rues souvent délabrées. Les scènes de rues et de vies d’Harlem prolongent l’exposition. À partir des années 1980, fascinée par le quartier afro-américain de Harlem, Barrat y photographie les joueurs de dominos, les musiciens des clubs de Blues et de Jazz, les breakers des blocks party au début de la révolution culturelle et musicale que représentera le hip-hop. La seconde salle de la galerie présente un focus sur les femmes de Harlem, proches  et amies de Martine Barrat, avec notamment Love, et Mabel, deux figures majeures de son oeuvre et de sa vie dont elle réalise des portraits puissants, lumineux et facétieux. À propos de Love, Martine Barrat écrit : “Love était une amie très chère que j’ai photographiée pendant de nombreuses années. Elle était aimée et admirée par tant de gens à Harlem. Quand elle marchait dans la rue, elle arrêtait les voitures parce qu’elle était si belle. Elle est également l’une des deux femmes admises au Rhythm Club, un endroit où les musiciens se rencontrent jour et nuit pour jouer aux cartes sur la 143ème rue. Tous les musiciens étaient si heureux quand elle venait.” Enfin, la dernière partie de cette exposition est dédiée à sa série Do or Die consacrée aux clubs qui forment les jeunes boxeurs à Harlem, Bed-Stuy et dans le Bronx. Cette série, remarquée à l’époque par le réalisateur Martin Scorcese et le photographe Gordon Parks, propulse Martine sur la scène internationale. Loin de représenter un monde de masculinité toxique, Martine Barrat photographie la boxe comme un rite fraternel où tendresse et adversité se rencontrent.

Martine Barrat est une photographe et vidéaste française dont le travail s’est en grande partie développé en dehors des circuits traditionnels de la photographie et autour d’un sujet principal : New York et ses communautés marginalisées. Actrice et danseuse dans le Paris des années 1960, elle s’installe à New York en 1968 invitée par MaMa Experimental Theatre Club (La MaMa E.T.C.), une organisation culturelle fondée par Ellen Stewart dans l’East Village. Dès son arrivée, Martine Barrat crée un atelier de rue qui allie théâtre et musique de jazz, dédié aux enfants du Lower East Side. Suite à un accident qui met fin à sa carrière de danseuse, elle se procure un appareil vidéo avec le soutien de Gilles Deleuze et de Félix Guattari et commence à filmer les gangs du Bronx. Les membres des Roman Kings et des Ghetto Brothers deviennent ses proches et elle les fait participer activement à la documentation de leur quartier et de leur vie quotidienne à travers des enregistrements audio et vidéo. À partir de ce projet documentaire important, elle réalise un film « You Do the Crime, You Do the Time » en 1978, présenté la même année au Whitney Museum. Le vol de son appareil vidéo conduit Pearl, le président des Roman Kings, à lui offrir son premier appareil photographique. Martine Barrat commence alors une oeuvre photographique passionnante guidée par sa curiosité intacte pour la rue, ses codes et ses modes de vie. Dans « Do or Die », elle photographie les clubs de boxe pour enfants dans les quartiers du Bronx, Harlem et Brooklyn. Dans les années 1980 et 1990, elle photographie avec la même énergie les habitants de Harlem dont la plupart sont ses ami.e.s et proches. Cette proximité avec la rue l’amène à être le témoin de la naissance de mouvements culturels et musicaux à l’instar du hip-hop. Dans les mêmes années, Martine Barrat voyage à Paris en France, où elle travaille pour le journal Libération. Pendant un de ses reportages, elle découvre la Goutte d’Or, un quartier habité très largement par une population originaire d’Afrique du Nord et subsaharienne. Elle y photographie la fraternité entre les enfants, les liens qui unissent différentes générations, et la volonté des habitants de créer un monde riche et joyeux malgré la précarité qui existe en arrière-plan. C’est dans ce quartier que Martine Barrat rencontre Mamadou Yaffa, alors enfant, qui devient un de ses modèles fétiches et avec qui elle construit des liens particulièrement forts, l’invitant même à passer un séjour à New York avec elle au cours de son adolescence. Martine Barrat adopte un point de vue humaniste sur La Goutte d’Or qui rappelle une certaine photographie française des années 1950. Cependant, elle choisit de photographier un « autre » Paris, méconnu des photographes et du grand public. Elle continue d’ailleurs, à chacun de ses passages dans la capitale, à se rendre à La Goutte d’Or, à échanger avec ses habitants et à les photographier. Le travail de Martine Barrat fait l’objet de nombreuses expositions à l’international. En 1984, des rétrospectives sont organisées au Musée d’Art Moderne de Paris, à l’Institute of Contemporary Art de Boston et à la Galerie du Jour d’Agnès b. En 2007, la MEP lui consacre une exposition et présente près de 200 tirages dans l’exposition Harlem In My Heart, un succès public et critique. Durant sa carrière, elle collabore avec de nombreux titres de presse comme le magazine Life, The New York Times Magazine, Vanity Fair, The Village Voice, Vogue, Paris Match, Le Monde, Die Zeit, La Republica et Libération. Elle réalise des portraits de nombreuses célébrités, comme Bob Marley après un concert à l’Apollo Theater en octobre 1979, ou encore Martin Scorsese qui fait appel à elle pour être photographié avec Alain Renais. En 2007, elle devient membre de l’ordre des Arts et des Lettres.

 


 

photographs by Martine BARRAT

Vernissage vendredi 24 mai à partir de 18h
From 24/05/2024 to 07/09/2024
La galerie rouge
3 rue du Pont Louis-Philippe
75004 Paris
France

Opening hours : du mercredi au samedi de 11h à 19h
Phone : 01 42 77 38 24
contact@lagalerierouge.paris
www.lagalerierouge.paris