VISA POUR L'IMAGE

34e FESTIVAL INTERNATIONAL DE PHOTOJOURNALISME - Perpignan


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Église des Dominicains – 6 Rue François Rabelais – Perpignan


ANA MARIA ARÉVALO GOSEN – Lauréate du Prix Camille Lepage 2021 – Días Eternos : Venezuela, Salvador, Guatemala (2017-2022)

«Rappelons que lorsqu’une femme est emprisonnée, ce n’est pas un individu qui souffre mais tout un réseau social. Au XXIe siècle, la chasse aux sorcières continue: les femmes exclues restent piégées.» Lisset Coba, 2015 La situation angoissante des femmes dans les prisons d’Amérique latine est peu évoquée, cela a pourtant des répercussions sur toute la région. Le système carcéral est en crise dans presque toute l’Amérique latine, et l’emprisonnement d’une femme peut affecter toute une génération. Ce travail se concentre sur la condition des femmes emprisonnées au Venezuela, au Salvador et au Guatemala, qui se trouvent dans une situation de vulnérabilité et de stigmatisation à vie. La plupart des centres de détention ne disposent pas des infrastructures nécessaires pour séparer les détenus par sexe. Au Venezuela par exemple, il n’existe aucun centre de détention provisoire réservé aux femmes. Quant aux prisons pour femmes, comme celle d’Ilopango au Salvador, elles ont été construites sur le modèle des prisons pour hommes. Les délais de procédure ne permettent pas non plus la séparation par crime ou par âge. Pour les détenus transgenres, c’est une expérience impitoyable car leur identité de genre n’est pas respectée et ils doivent attendre leur procès avec des détenus masculins. Loin d’être des lieux où les détenues sont aidées à préparer leur réinsertion dans la société, ce sont avant tout des lieux de souffrance. Les femmes y vivent un enfer: cellules surpeuplées, privations, détentions provisoires qui s’éternisent, droits fondamentaux bafoués. De plus, les femmes reçoivent moins de visiteurs alors qu’elles dépendent de l’aide extérieure pour survivre à cette expérience. Le soutien psychologique des proches est essentiel, mais surtout leur aide matérielle compense l’incapacité de l’État à fournir nourriture, vêtements et médicaments aux détenues. Cependant, l’aspect le plus difficile de la vie des femmes en prison est lié à la maternité. Dans ces trois pays, il n’existe souvent qu’un seul secteur réservé aux femmes avec leurs enfants pour l’ensemble de la population carcérale. Si les mères trouvent un grand réconfort à avoir leurs enfants avec elles, elles se sentent coupables en même temps de leur faire vivre ça. Et elles savent de toute façon que la séparation arrivera inéluctablement, ne pouvant les garder que jusqu’à l’âge de 3 ans au Venezuela, 4 ans au Guatemala, et 6 ans au Salvador. Malgré tout, les femmes tissent entre elles des liens extraordinaires d’amitié et de solidarité et font preuve de résilience. Elles partagent tout : nourriture, lits, vêtements et histoires personnelles. Leur corps devient un symbole de résistance, de rébellion contre le système. Elles se tatouent, se maquillent et se coiffent parce que c’est la seule chose qu’on ne peut pas leur enlever. Les détenues quittent la prison traumatisées et stigmatisées. Privées d’espoir, d’emploi et d’un réseau de soutien à l’extérieur, les femmes sont susceptibles de réintégrer la vie de gang ou de commettre des crimes à leur sortie de prison.

Ana María Arévalo Gosen

 



EUGENE RICHARDS – En marge

Inspirée de quelque cinquante années de photographie, cette exposition pourrait suivre un ordre chronologique, de mes tout premiers récits photographiques dans le sud des États-Unis en 1969 jusqu’à mon retour dans le delta de l’Arkansas en 2019. Elle pourrait aussi être structurée par thèmes : la misère aux États-Unis, le sort des handicapés mentaux, le coût humain de la drogue, de la guerre, le cancer d’une femme. L’une ou l’autre approche donnerait l’impression que j’ai participé à l’élaboration de cette exposition dès le départ. C’est faux. J’ai commencé à chercher ces photos il y a de longs mois, sur les conseils de mon fils Sam qui avait remarqué que j’étais abattu, incapable de faire quoi que ce soit. Les ravages du Covid accaparaient mon esprit, tout comme l’Afghanistan et l’Irak, et le sentiment que d’autres guerres se profilaient. J’avais aussi du mal à accepter les fractures au sein de la société ainsi que le nouveau visage du journalisme aux États-Unis. De plus en plus de partisans de la politique identitaire suggéraient que certains photographes méritaient plus de soutien que d’autres. Que l’âge, la race, la classe sociale, le genre des journalistes sont des facteurs à considérer avant de nous envoyer en mission. Il me semblait également qu’à l’exception peut-être des photos de guerre, les images publiées dans les livres et les magazines d’actualités étaient de moins en moins prises sur le vif, et de plus en plus souvent mises en scène, construites, en collaboration avec les sujets. «Collaboration» étant apparemment le mot à la mode ces temps-ci. C’est finalement mon fils qui m’a orienté vers une nouvelle manière de publier et de m’exprimer. «Aujourd’hui, il n’y a pratiquement personne pour te soutenir dans ce que tu penses devoir faire, alors publie tes photos sur Instagram», m’a conseillé Sam. «Instagram», ai-je répété, incrédule. Alors, tel un automate, j’ai commencé à parcourir les vieux classeurs craquelés et gondolés remplis de planches contacts qui occupent sept ou huit étagères d’un débarras au fond de notre maison. Au fil des pages, j’ai cherché des clichés que je n’avais encore jamais montrés ni publiés, triant des centaines de moments de la vie des autres, submergé de souvenirs. Et puis, à ma grande surprise, Jean-François* m’a téléphoné. C’est un homme qui ne se soucie pas de qui vous êtes, de votre âge, de vos origines ou de votre identité de genre tant que vous vous efforcez de raconter la vérité. C’est son intérêt pour mes photos ainsi que la bienveillance de ma femme Janine et de Sam qui m’ont remis au travail.

Eugene Richards

* Jean-François Leroy, directeur du festival.

 



GEORGE STEINMETZ – Pêches mondiales

Ces deux dernières décennies ont vu la pêche industrielle se développer à un rythme effréné. Des flottes internationales de méga-chalutiers, de super-senneurs et de navires-usines sont en concurrence avec un nombre croissant de bateaux de pêche locaux pour vider les réserves halieutiques des océans. Un exemple classique de tragédie des biens communs où des individus surexploitent une ressource partagée. La gravité de ce problème mondial a été récemment quantifiée dans une étude pionnière menée sur dix ans par le biologiste Daniel Pauly (université de la Colombie Britannique, Canada), qui a montré que le nombre de poissons pêchés dans le monde est supérieur de 50 % aux chiffres rapportés par l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, la raison étant que les données sources sont autodéclarées par chaque pays. L’équipe du professeur Pauly a minutieusement reconstruit les données historiques pour montrer que les prises mondiales de poissons ont atteint un pic en 1997 à 130 millions de tonnes. Elles ont depuis diminué de 1,2 million de tonnes par an, malgré l’augmentation considérable du nombre et de la taille des bateaux de pêche et l’apparition de nouvelles technologies pour le repérage des poissons. Ce sont des signes évidents que les réserves de poissons sauvages sont en chute libre face à la surexploitation de la biosphère par l’homme. Les photographies de cette exposition ont été prises au cours des six dernières années dans neuf pays. Elles montrent des navires parmi les plus grands et les plus sophistiqués pour exploiter la faune marine, ainsi que des pêcheurs pauvres des pays les moins développés du monde qui fouillent désespérément les eaux côtières pour nourrir leurs familles. Mais en parcourant les sept mers, je n’ai pas rencontré que malheur et pessimisme. J’ai également découvert des pêches raisonnées qui exploitent des espèces spécifiques de manière durable, avec une surveillance scientifique des populations de poissons pour garantir leur présence à long terme. Ceci pour rappeler qu’il existe des solutions, mais seulement si nous cherchons à mieux comprendre les sources et les impacts de nos choix alimentaires afin de prendre des décisions plus éclairées. Ainsi, la prochaine fois que vous achèterez un produit de la mer, cherchez à savoir comment il est arrivé sur votre marché local et souvenez-vous que même les poissons et fruits de mer d’élevage, comme le saumon et les crevettes, dépendent de la pêche sauvage pour leur alimentation.

George Steinmetz

Ce projet a été partiellement financé grâce à une subvention de la National Geographic Society.

 


 

 

photographs by 25 expositions

Du 12 au 16 septembre et du 19 au 23 septembre, les expositions restent ouvertes spécialement pour les groupes scolaires (sur rendez-vous).
From 27/08/2022 to 11/09/2022
Église des Dominicains - Couvent des Minimes - Palais des Corts - Caserne Gallieni - Chapelle du Tiers-Ordre
6 Rue François Rabelais - 24, rue Rabelais - Place des Orfèvres - 4 rue de l’Académie - Place de la Révolution Française
66000 Perpignan
France

Opening hours : Entrée libre - De 10h00 à 20h00
Phone : 0142339318
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www.visapourlimage.com