L'Orphelin Chinois

Jin TIAN


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En 1986, je suis né dans la ville située le plus au sud de la Chine. À cette époque, ce fut la fin de la planification impérative de l’économie. À ce moment là, nous devions utiliser des tickets pour faire nos courses, car l’approvisionnement était plus qu’insuffisant. J’ai grandi dans les années 90 au début de la réforme économique chinoise. Les entreprises publiques ont fait faillite, les ouvriers ont perdus leurs travails, beaucoup de paysans ont quitté leurs terres, ils sont allés à la ville pour pouvoir avoir la chance de vivre une nouvelle vie. C’était aussi le moment où la planification familiale était très stricte. Je me souviens quand j’étais petit, que peu importe l’endroit, que ce fût sur une place ou dans le couloir d’un hôpital, il me semble qu’il avait toujours des enfants qui pleuraient. Quand j’avais 5 ans, il y a eu un après-midi assez chaud, j’avais une forte fièvre, et malgré les nombreux vêtements que je portais, j’avais la sensation d’avoir froid. Mon père m’a tiré par la main, nous avons traversé le couloir de l’hôpital. L’odeur du désinfectant se répand partout dans l’air, non loin de moi sur un brancard se tenait un bébé enroulé dans un tissu blanc, il avait les yeux fermés, son visage semblait flétrie de couleur gris et violet, il avait la bouche ouverte, et il y avait quelques mouches qui survolaient sans cesse son visage. À partir de ce moment-là, ce visage est devenu le fantôme qui a hanté toutes les nuits de mon enfance. Plus tard, j’ai quitté la maison et voyagé en traversant toutes les régions du pays, j’ai vu beaucoup de changements dans mon pays. Il y a d’innombrables routes qui ont été crées, elles sont les ponts entre la campagne et la ville. La campagne est en train de mourir, la ville n’arrête pas de grandir, elle a devenue un monstre qui engloutit tout. C’est un nouveau monde, l’homme nouveau est né, nous avons écrit l’histoire. En trente ans seulement, la Chine a réussi à créer son nouveau monde moderne. Les gens qui n’ont pu suivre la marche sont des gens qui ont été abandonnés, ils vivent à l’extérieur de la ville, dans les coins sombres, invisibles et silencieux, ils ont été enterrés dans les ruines de la ville, devenus squelettes, ils sont des fantômes. L’orphelin Chinois En 2015, je suis allé à la frontière entre la Chine et la Birmanie pour la recherche d’un projet. Dans les zones frontalières à distances, je ne connais personne, il y avait toujours des enfants qui m’ont donné un coup de main. Ils ont su me guider là-bas. J’ai passé plusieurs districts, à la fin j’ai rencontré beaucoup d’enfants. Nous somme devenues des amis, ils m’ont posé beaucoup de questions par rapport au monde extérieur et, au fur et à mesure de nos échanges, j’ai appris à connaître leurs conditions de vie. Ça m’a donné l’idée de faire un projet sur les enfants chinois. Au début, j’ai commencé par des rapports, d’enquêtes et des articles de presse au sujet des conditions de vie des enfants en Chine, et je suis tombé un jour sur le reportage au sujet de l’orphelinat Ai Zhi Jia (littéralement la maison de l’amour) à Jingang de la province de Nanyang et j’ai tout de suite décidé de m’y rende. L’église catholique de Jingang a été construite en 1844, elle est suitée à Jinggang qui est la banlieue nord-ouest de Nanyan. L’orphelinat Ai Zhi Jia est dans l’aile sud de l’église. Il s’agit de la paroisse catholique la plus grande de la province du Henan, où habitent des nonnes. Plus tard, une maison de retraite a été fondée pour aider les croyants et les personnes âgées. A partir de 1998 environ, l’on note un phénomène d’abandon d’enfants handicapés ou gravement malades devant l’église. Les nonnes, par pitié, élèvent ces enfants dans l’église, prennent soin d’eux avec une partie de leur ration et des allocations des vieilles personnes. Un orphelinat se trouve cependant à quelques kilomètres de là, mais les enfants y sont souvent rejetés et l’on y refuse l’entrée pour une visite. D’après les nonnes, lorsque des inspections sont organisées par des dirigeants, ils viennent « reprendre » quelques enfants très handicapés et les ramènent ensuite. Cette institution préfère adopter les orphelins en bonne santé, les enfants handicapés de Jingang représentent davantage un embarras pour eux. Selon les dispositions légales en Chine, lorsque les personnes et les organisations créent un établissement social pour orphelins et bébés abandonnés, ils sont obligés de collaborer avec le département des affaires civiles du gouvernement au niveau du district ou à une échelle supérieure. Par ailleurs, l’adoption d’enfant ne peut pas être effectuée sans examen et autorisation par les bureaux des affaires civiles qui distribuent un accord d’adoption. Par conséquent, l’instauration de l’orphelinat Ai Zhi Jia rattaché à la maison de retraite de Jingang est considérée comme illégale. Non seulement Ai Zhi Jia ne peut pas toucher des subventions du gouvernement, mais en plus le département des affaires civiles local a interdit pendant longtemps aux médias de réaliser des reportages à son sujet. C’est pour cette raison que les aides populaires (non officielles) sont aussi limitées. Depuis des années, les frais sont pris en charge par les nonnes et le directeur de la maison de retraite. Bien qu’ils ont commencé à recevoir des aides depuis la diminution des contraintes vis-à-vis des médias il y a quelques années, ce sont toujours les nonnes, de plus en plus âgées, qui s’occupent de ces enfants et qui vivent sous la menace, sans lendemain. L’orphilinat de Jingang a eu un énorme impact sur moi, et j’ai décidé de documenter cela avec mon appareil photo. A la fin de l’année 2015, j’ai continué à photographier l’orphelinat de Nanyang, puis au cours de recherches, je suis tombé sur des coupures de presse et mon projet s’est élargi, concernant désormais la situation présente de ces enfants sur l’ensemble du territoire chinois. Suite à ce premier voyage à Jingang, j’ai effectué des reherches sur près de 25 orphelinats dans 10 province du pays, ainsi que sur plusieurs famille adoptives. Cette deuxième partie « l’orphelin Chinois » va demander un an pour être réalisée. Les dix provinces sont : Henan, Hebei, Shaanxi, Shanxi, Shandong, Anhui, Fujian, Guangxi, Gansu, Jiangsu.

 


Pays : Chine

Nombre de photos : 34