Juan Pablo GUTIERREZ
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En 1492, mes arrières petits parents, ceux qui ont vécu et marché libres sur leurs terres pendant si longtemps, ont Découvert qu’ils étaient indigènes, Découvert qu’ils étaient nus, Découvert qu’ils habitaient une terre appelée ‘Amérique’, Découvert qu’ils devaient obéir à un roi et une reine d’un autre monde et à un dieu d’un autre ciel. Mes arrières petits parents ont découvert que ce même dieu les enverrait au bûcher s’ils continuaient à adorer la lune, le soleil, la terre et la pluie qui depuis toujours les avaient baignés. Étant enfant en Colombie, on m’a appris qu’en 1492 ont avait été ‘découverts’. On m’a dit qu’à partir de ce moment nous avons commencé à exister officiellement sous le nom de ‘nouveau’ monde. Au long de mes voyages et habitant en Europe depuis 11 ans, j’ai pu constater l’acceptation collective de la fausse version de notre histoire. Il est maintenant bien clair pour moi que cette époque a été le principal déclencheur de la perte de nos vraies racines et l’avènement de la soumission. En 2009, la Cour constitutionnelle colombienne a classé ‘en imminent risque d’extinction’ les peuples autochtones colombiens en raison de la guerre, du modèle de développement économique et de la négligence du gouvernement. C’est exactement à ce moment que je me fixais le but de créer un album de famille de mes frères indigènes par le biais de la photographie comme une empreinte substantielle pour témoigner de la richesse ethnique et culturelle colombiennes. Les visages apparaissant sur mes photos ne sont ni les victimes de l’histoire qui leur a été imposée, ni les clichés de l’exotisme ou du folklore de ce monde. C’est ma famille, avec laquelle je vis et partage, celle avec qui je ris, pleure et danse. Dans ce contexte, l’acte photographique n’est pour moi que le résultat de tous ces moments de partage, d’entente et de sensations; et le temps l’obturation de l’appareil photo se réduit à une centième de seconde où je pense et vois avec le cœur, bien loin de la technique d’exposition et composition. La photographie me donne l’opportunité de créer un album de famille et d’offrir une vision du monde de ceux qu’on n’a pas visualisés à travers l’histoire, ou bien l’on n’a pas permis de se rendre visibles. Avec ce document je rends un hommage aux 102 Peuples Indigènes qui survivent en Colombie mais je sonne l’alarme : c’est la revendication de nos droits et une célébration de la beauté du monde. La photographie me sert de moyen pour mettre en avant et magnifier ce que nous sommes en train de perdre. Pour chacun d’eux, les ancêtres de mes ancêtres, qui exterminés par millions, soumis et disparus, ainsi que pour tous ceux qui résistent encore aujourd’hui et s’accrochent à la vie pour ne pas disparaître, cet hommage qui reflète la beauté, la dignité et le désir de vivre : JUSQU’À CE QUE LE SOLEIL S’ÉTEIGNE.
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