VIVRE...


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Après quatre ans de silence assourdissant, une surexposition médiatique a renversé les milles de Cachan en les transformant d’ombres aux marges de la légalité dont personne ne parle au stéréotype du « sans papier » : victimes pour certains, problème embarrassant pour d’autres. Les images de familles entassées les sur les autres le long d’un trottoir ou à l’intérieur d’un gymnase ont occupé pendant des jours entiers les fréquences télévisées et les pages des journaux. Politiciens, intellectuels et volontaires de la dernière minute, toujours assez en retard pour vouloir être en première ligne sous les projecteurs et sans pour autant s’être engagés dans les décisions et dans les choix, ont attendu dans la file d’attente pour participer à l’énième cérémonie de la pitié solidaire. Encore une fois, les rites et les mots se sont consommés, mais le passé et l’expérience humaine du Bâtiment F a été submergé de mots préfabriqués. Même la bataille, par moments politique, des hommes et des femmes venus en France pour survivre et pour assurer un avenir à leurs fils, qu’ils soient en Europe ou en Afrique, a été réduite à un déjà-vu.
Avec cette évacuation, ce n’est pas simplement un squat qui disparaît, mais c’est une société civile qui a été rayée : un village de mille personnes avec son bagage d’histoires humaines, faites de règles, de problèmes, de rites et de compromis a été abattu par la devise de la Real Politik : divide et impera.
Mais plus que tout, un autre témoignage de la capacité de l’homme à reconstruire, dans n’importe quelle circonstance, encore une fois sans garanties, un lieu qui lui ressemble, qui lui appartient, et qu’il puisse appeler maison, a été oublié.

Photographies ACERBIS Francesco