RUSSIE : Les journalistes indépendants en danger


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Reportage photographique de
Ilenia PICCIONI et Antonio TISO La Russie est l’un des pays les plus dangereux pour les journalistes. C’est le troisième pays au monde qui compte le plus de journalistes tués dans l’exercice de leur fonction ces dix dernières années, après l’Irak et l’Algérie. Leur tête est mise à prix. Dix-huit journalistes ont été abattus en Russie depuis l’an 2000. Tous ces cas de meurtres ont été résolus, sauf un. Beaucoup d’autres ont été attaqués, menacés ou emprisonnés.
En Russie, la plupart des journalistes sont visés à causes de leurs articles sur des sujets tels que la corruption, les violations des droits de l’homme et d’autres actes contraires à la loi. Sous le gouvernement de Vladimir Putin, l’ensemble des réseaux de télévision les plus populaires sont tombés sous le pouvoir de l’Etat. La diffusion des informations a été neutralisée. La plupart des grands journaux sont sympathiques au Kremlin ou appartiennent à des groupes d’affaires alliés au Kremlin. Les autorités, en province comme à Moscou, harassent légalement les journalistes critiques par l’exercice de la censure. Elles échappent ainsi aux médias.
Pourquoi tant de journalistes sont-ils victimes d’assassinat en Russie ?
En 2004, Anna Politkovskaya écrivait : « A cause de notre ignorance, nous retournons à toute vitesse dans les abysses soviétiques, dans un grand vide qui mène à la mort. Tout ce qui nous reste, c’est internet, où l’information peut être accédée gratuitement. Pour le reste, si vous voulez travailler en tant que journaliste, c’est dans une totale servilité à Putin. Sinon, ce sera la mort par balle, l’empoisonnement ou les procès ou n’importe quelle la méthode que les services secrets, les chiens de garde de Putin, trouvent approprié. »  LÉGENDES: 01 – La place Rouge vue depuis la Cathédrale Saint-Basil.

02 – Anna Politkovskaya, correspondant spécial à la Novaya Gazeta, a été retrouvée assassinée dans l’ascenseur de son immeuble dans la rue Lesnaya à Moscou le samedi 7 octobre 2006. Elle a été tuée de plusieurs balles: deux dans la poitrine, une dans l’épaule et une dans la tête tirée à bout portant.

03 – Le bureau d’Anna Politkovskaya à la Novaya Gazeta. Il n’a toujours pas été attribué à quelqu’un d’autre.

04 – Ilya Politkovski est le fils d’Anna Politkovsjaya. Il réclame justice au nom de sa mère en Russie. Il est prêt à aller devant la Cour de justice des Communautés européennes si la Justice russe ferme le dossier.

05 – Le Tribunal militaire russe est situé dans la rue Old Arbat à Moscou. C’est là que s’est déroulé le procès pour le meurtre de la journaliste d’investigation Anna Politkovskaya, assassinée en octobre 2006. En février 2009, la Cour a acquittée trois hommes accusés de complicité dans cette affaire. Le directeur de l’Union des journalistes russes se dit « honteux » d’un tel verdict. Le procureur a fait savoir qu’il ferait appel.

06 – Entrée de la Novaya Gazeta.

07 – Le journaliste d’investigation Elena Kostyuchenko dans les bureau de la Novaya Gazeta à Moscou. Elle enquête actuellement sur l’affaire Beketov (éditeur de Khimkinskaya Pravda) qui a été victime d’une violente agression en novembre 2008.

08 – Une peinture satirique au siège de la Novaya Gazeta.

09 – Ismailov Viacheslav était un collègue de Politkovskaya à la Novaya Gazeta. Il est un ancien Major-général de l’armée russe et s’est battu lors de la Première guerre de Tchétchénie. Il a décidé de devenir journaliste pour dénoncer les abus et les violences contre les êtres humains dont il a été témoin. Il enquête maintenant sur le meurtre de Politkovskaya à la demande de Novaya Gazeta.

10 – Le siège du FSB (ancien KGB) sur la place Lubianka. Beaucoup de législateurs de l’opposition russe et de journalistes d’investigation ont été assassinés alors qu’ils enquêtaient sur la corruption et les crimes présumés du FSB et de personnes hauts placées dans le gouvernement. Dans son livre "Putin’s Russia: Life in a Failing Democracy", Anna Politkovskaya accuse le FSB de réprimer les libertés civiles pour établir une dictature semblable à celle des soviétiques.

11 – Ivan Safronov fut enterré au cimetière de Khovanskoye à Moscou le 7 mars 2007. Il était un journaliste et un chroniqueur russe. Il couvrait les affaires militaires pour le quotidien Kommersant. Il mourut après avoir fait une chute du cinquième étage de son immeuble. Son appartement était au troisième étage. Il a peut-être été tué pour ses reportages critiques. Les collègues et voisins de Safronov doutent qu’il se soit suicidé. Ils disent qu’il se sentait bien.

12 – Maryana Torocheshnikova est journaliste à la branche muscovite de la Radio Svoboda. Elle est spécialiste des affaires concernant les droits de l’homme et des affaires judiciaires.  Radio Svoboda diffuse les actualités. Cette radio est la branche russe de Radio Liberty, une organisation à diffusion internationale qui fournit les actualités et donne informations et analyses aux pays où les medias non gouvernementaux sont souvent limités ou interdits.  RFE/RL bénéficie de l’audience de plus de 25 millions d’auditeurs et de lecteurs dans 20 pays. L’organisation fut créée par le Congrès des Etats-Unis.

13 – La Tour Ostankino est une tour autoportante de radio et télédiffusion située à Moscou en Russie. Elle mesure 540 mètres de haut et a été conçue par Nikolaï Nikitine. C’est la première structure autoportante qui mesure plus de 500 mètres de haut. La tour fut construite pour le cinquantième anniversaire de la Révolution d’Octobre.

14 – Deux anciens soldats russes chantent dans les rues de Moscou. Anna Politkovskata dénonce la situation critique dans laquelle se trouvent les soldats russes et l’indifférence et le dédain dont ils sont victimes de la part de leurs commandants et des dirigeants politiques. Quand un soldat russe a un accident, disait-elle, l’Etat l’oublie. Il y a de nombreux participants à la guerre de Tchétchénie parmi les invalides qui vivent dans les rues de Moscou. Ils mendient et demandent de l’aide. Ce problème est un tabou pour les médias russes.

15 – Kostoev Ibragim est un journaliste Ingouche. Il collabore avec "Dosh Digest", un magazine Tchétchéne indépendant qui a son siège à Moscou. Kostoev est aussi journaliste pour un site internet, Ingushetia.ru, un blog qui condamne la politique du Kremlin et propose une liste de reportages critiques de la politique gouvernementale dans le Caucase. Le rédacteur en chef du blog,  Magomed Yevloyev, a été assassiné le 31 août 2008 et une ordonnance émanent de la Cour de justice russe exige la fermeture du site Ingushetya.ru pour la publication  « d’articles extrémistes ».

16 – Rue Prechistenka au cœur de Moscou. C’est là que l’avocat, Stanislav Markelov, et la jeune journaliste de la Novaya Gazeta, Anastasia Baburova, ont été assassinés le 19 janvier 2009. Markelov était un avocat spécialisé dans les droits de l’homme et un journaliste d’investigation qui écrivait des articles sur la Tchétchénie.

17 – Université Lomonosov de l’Etat de Moscou. La Faculté de Journalisme est la principale institution d’enseignement russe pour les journalistes. Elle a été créée en 1952. Plus de 15 000 spécialistes travaillant dans différentes branches des medias – journaux, magasines, chaînes de télévision et stations de radios, nouvelles agences et éditions internet en Russie et à l’étranger – sont sortis de cette Faculté. Anastasia Baburova, la jeune journaliste de la Novaya Gazeta, assassinée en janvier 2009, y enseignait l’informatique.

18 – Oleg Panfilov et sa secrétaire au siège du CJES à Moscou. Panfilov est le directeur du « Center for Journalism in Extreme Situations ». Le CJES fut fondé le 1er  février 2000. C’est une organisation qui défend les droits de l’homme au sein de l’Union russe des Journalistes.

19 – Andrei Mironov est un journaliste dissident de l’ère soviétique et un survivant du Goulag. Il travaille aussi avec l’association Mémorial (ONG russe de défense des droits de l’homme). Il était un ami d’Anna Politkovskaya et collaborait avec elle.

20 – Evgenia Chirikova est une activiste du parti politique Vert russe qui milite pour la protection de la forêt de Khimki. Elle travaille aussi comme journaliste pour le journal en ligne Ecmo.ru et collabore avec le journaliste de l’opposition Mikhail Beketov (éditeur de Khimkinskaya Pravda) qui s’est fait violemment agressé en novembre 2008. Beketov est toujours hospitalisé à l’heure actuelle. Evgenia continue à vivre normalement malgré les menaces qui pèsent sur sa vie.

Photographies TISO Antonio