MELITA, טלמ −MLṬ, REFUGE


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Une exposition portée par Stimultania. En partenariat avec Spazju Kreattiv à Malte, MaltaBiennale.2024, l’ambassade de France à Malte, l’Institut français de Palerme, l’Institut français de Tunis, EgliseART à Palerme, le festival Jaou Photo à Tunis et le Lab27 à Trévise. Cette exposition s’inscrit dans le cadre du programme « Suite », à l’initiative du Centre national des arts plastiques, avec le soutien de l’ADAGP et de la Copie privée.

Pour Melita, טלמ −mlṭ, Refuge, Anne Immelé s’est rendue sur les îles maltaises, en Sicile et en Tunisie pour documenter de manière sensible les routes migratoires contemporaines tout en les reliant aux voyages des Phéniciens dans l’Antiquité. Cette exposition rassemble plus de cent photographies et combine différentes séquences photographiques autour des notions de refuge et d’habitation.
L’histoire des Phéniciens (1200 – 300 av. J.-C.), marchands conquérants qui s’établirent dans diverses villes méditerranéennes, permet de retracer les voies de passage en Méditerranée. En juxtaposant les anciennes routes de conquête commerciale aux routes migratoires contemporaines, on voit se dessiner des imbrications. Anne Immelé met ici en dialogue les notions de refuge dans les anciens territoires puniques et les mouvements migratoires d’aujourd’hui.
Cette exposition propose des récits polyphoniques entrecroisant plusieurs voix/routes dans l’espace méditerranéen. La partie textuelle revêt une place importante.

 

CINQ CHAPITRES
Mon inspiration est née à Malte suite à ma découverte simultanée de grottes et de traces de la civilisation phéniciennes dans un contexte économique qui est celui de la crise migratoire.
Si les routes des phéniciens étaient guidées par les échanges commerciaux, ce qui m’a particulièrement intéressée est la manière dont ils ont créé les conditions de vie dans les différents comptoirs (villes) qu’ils ont pu développer en Méditerranée. Des sites comme Tas Silġ (Malte), Kerkouane (Tunisie) ou Mozia (Sicile) en témoignent. C’est l’aspect de quête qui m’a guidée et m’a menée à continuer le projet en Sicile et en Tunisie. Ce désir d’une vie meilleure est l’une des motivations majeures qui déclenche la décision de faire la traversée pour des millions d’Africains aujourd’hui.
Depuis l’antiquité, l’humain est en quête d’un refuge, d’un habitat et des conditions de survie que l’on peut y associer. La notion de refuge est aussi profondément liée à l’histoire de Malte à travers le naufrage de Saint Paul et son refuge dans une grotte. La notion de refuge est aussi liée à la construction d’habitation. Que ce soit à Gozo, sur l’île sicilienne de Favignana ou à la pointe nord de la Tunisie, l’exploitation des carrières de calcaire corallien a permis la circulation des pierres pour de nombreuses constructions et ce, depuis l’Antiquité. Pour l’exposition j’ai créé une séquences permettant de montrer une continuité entre les roches brutes et leur exploitation dans les constructions d’habitations.
Mais le refuge peut aussi être un arbre, et cela je l’ai découvert à Palerme en découvrant les ficus géants macrophylla. J’y ai réalisé des portraits mis en scène avec Ibrahima, réfugié natif de Côte d’Ivoire.
L’histoire chrétienne s’accompagne de la notion d’hospitalité, cette valeur idéalisée est également mise en avant au siècle des lumières et notamment par Emmanuel Kant dans son Projet de paix perpétuelle (1795). Aujourd’hui il apparait que l’hospitalité est très éloignée de la vie réelle et des conditions de traitement des migrants en Europe. Il y a un écart entre des actions associatives ou individuelles et les politiques de refoulement de l’Union européenne.
Au cours de mon projet, j’ai été plus sensible aux initiatives positives liées à l’accueil des migrants. Par exemple à Palerme, ville où j’ai rencontré Said, réfugié tunisien, qui mène aujourd’hui des actions d’aide aux nouveaux arrivants. Je suis ensuite allée sur l’île de Djerba, point de départ de la traversée de Saïd.
À la manière d’un poème visuel, l’exposition entremêle différents lieux et sujets. La dimension documentaire est présente dans mon approche directe du réel. Mais il est impossible de tout représenter, le réel excède toujours sa représentation photographique. Par contre, l’image photographique revêt une dimension fictionnelle, ouvre aussi sur un nouvel imaginaire.
Pour la période contemporaine, j’ai écouté et transcrit les histoires personnelles des migrants et citoyens rencontrés. Les photographies réalisées ne viennent pas illustrer ces récits. Mes photos s’inscrivent dans la complexité géo-politique de la condition migrante contemporaine mais s’écartent du photo-reportage en invitant à une mise en perspective temporelle et géographique.
Je n’ai pas voulu traiter les migrants comme une masse d’individu représentant une menace pour l’Europe, mais considérer chaque personne de manière singulière. Ainsi j’ai noué des relations personnelles avec Hadia, Hampton, Saïd, Adam, Ibrahima, Mhamed, Chamsodine… ÀZarzis (au sud de la Tunisie), j’ai rencontré Chamsodine Marzoug. Comme d’autres pêcheurs, depuis une dizaine d’année, il est confronté à la découverte de corps ou de morceaux de corps décomposés. Face à cette situation, il est à l’initiative d’un cimetière des inconnus. J’ai photographié ce morceau de terre, dans le silence et la désolation. Donner un nom aux disparus en mer est parfois impossible, mais ces tombes leur rendent hommage. Dans l’exposition les tombeaux phéniciens de Mozia font face à ce cimetière des inconnus.

 

BIOGRAPHIE
Anne Immelé (née en 1972 à Mulhouse, France) est une photographe et commissaire d’exposition. Ses photographies examinent la myriade de dimensions de notre relation avec le territoire : géographique, humaine et sociale, mais aussi mémorielle et poétique.

C’est par l’édition et l’affichage que ses images entrent en dialogue les unes avec les autres, créant un terrain de confrontation. Par ce moyen, Anne Immelé renouvelle un questionnement sur le vivre ensemble et le partage d’une expérience commune comme en témoigne le livre Jardin du Riesthal (Médiapop, 2022) consacré à un jardin ouvrier.
Elle a participé à de nombreuses expositions. Parmi elles : Comme un souvenir, Fondation Fernet-Branca (2019), 50 ans de photographie française, Palais Royal (2020), Paysages Français, une aventure photographique à la Bibliothèque Nationale de France (2017-2018), L’Atlas des Nuages, Fondation François Schneider (2018), Jardins du Riesthal à la Galerie Madé parcours Elles x Paris Photo (2022).
Docteur en art, Anne Immelé exerce une activité de commissariat d’exposition. Elle a développé une réflexion sur la mise en espace de la photographie et sur le médium de l’exposition en lui-même. Ses recherches curatoriales font suite à une thèse de Doctorat en Arts, soutenue à l’Université de Strasbourg, parus sous le titre Constellations photographiques chez Médiapop éditions. En 2013, elle fonde, avec Jean-Yves Guénier, la BPM-Biennale de la photographie de Mulhouse dont elle assure la direction artistique et le commissariat de certaines expositions. Elle enseigne également à la HEAR (Haute école des arts du Rhin).

 


 

Photographies Anne IMMELÉ

VERNISSAGE LE VENDREDI 04 OCTOBRE DE 18 H À 21 H
Du 04/10/2024 au 11/01/2025
STIMULTANIA - Pôle de photographie
33 rue Kageneck
67000 Strasbourg
France

Horaires : Du mercredi au samedi 14 h - 18 h 30
Téléphone : +33388236311
www.stimultania.org