Vendange familiale dans le Douro

Rui MOREIRA


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Durant tout le mois de septembre la région viticole de la Vallée du Douro au Portugal est en pleine effervescence. Tout le monde se presse pour récolter le précieux raisin, il n’y a pas de dimanche et les soirées sont employées à fouler le moût, "mosto" dans les "lagares" (cuves en granit ou le raisin va fermenter). Zé et Clara habitent dans le village de "Galafura", près de la ville de "Peso da Régua" dans le Haut Douro, "Alto Douro" la région du vin de Porto. Les parents de Clara habitent aussi dans ce village renommé pour avoir un des plus beaux points de vue vers le fleuve et le paysage environnant, là où a été construite la chapelle dédiée aux patrons du village : "São Leonardo" et "Santa Barbara" (qui est représentée avec une grappe de raisins dans sa main!). J’ai voulu montrer la beauté et la difficulté du travail de la vigne à partir d’une jeune famille qui n’a pas voulu émigrer en France. Pour eux, le goût de la terre et la satisfaction qu’ils tirent de leur travail est évidente. Pour le jeune couple Clara et Zé, chaque vendange est une joie mais aussi un tour de force ! Et ici on touche à la problématique sociale de cette région viticole très ancienne : la désertification de la population jeune. Le manque de bras se fait sentir très fort, pas seulement au moment des vendanges, car la vigne requière de l’attention et des soins toute l’année. La plupart des jeunes ont opté pour l’émigration et la main d’oeuvre est d’année en année plus difficile à trouver. Les grands propriétaires de la région, en grande majorité des Anglais, font appel à des travailleurs venus surtout de l’Europe de l’Est comme les Ukrainiens, les Bulgares, mais aussi des Gitans résidents au Portugal. Le raisin et le vin étant très mal payés (sauf le raisin destiné à faire du vin de Porto), les petites familles comme celle de Zé et Clara sont obligées de couper dans les dépenses, allant même parfois, jusqu’à n’engager aucun personnel et devoir prolonger la vendange pendant un mois entier, comme ce fut le cas en 2013 et 2014. En 2015, année de mon reportage Zé et Clara ont décidé d’engager 1 homme et 2 femmes pour aller plus vite dans la récolte. En plus de leurs vignes, ils doivent aider Carlos et Palmira, les parents de Clara qui prennent en charge les propriétés de leurs proches émigrés en France. Ce furent des journées de travail ininterrompu, sous un soleil de plomb et à un rythme soutenu. J’ai observé le va-et-vient entre les vignes et le "lagar", le vin se faisant au fur et à mesure, avec pour tout contrôle la mesure du degré de sucre du jus en fermentation, puis les soirées consacrées à fouler le moût pieds nus dans le "lagar" pour faire descendre la "manta", le manteau composé des peaux et des pépins de raisins. Dans le "lagar", le moût passera encore par un pressoir manuel centenaire pour exprimer tout le jus restant. Physiquement ce travail est très dur, c’est un travail d’homme que Clara et Zé assument à eux deux. La matière sèche, le marc, servira à faire de l’eau de vie. Cette année- là, les raisins était très doux et l’ensoleillement favorable, ce qui a fait prévoir une bonne année pour le vin de pays qui allait en sortir. Je peux le confirmer maintenant, il est très bon.

 

Country : Portugal
Region : Douro
Place : Peso da Régua

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