SILVATICUS

Préserver un monde hors de notre société

Geoffroi CAFFIERY

Le sol, camaïeu de verts, est souvent recouvert d’une mousse peuplée d’insectes. Un rayon de lumière survient, un ravissement. […]


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2019

La Biélorussie est considérée comme le « poumon vert » de l’Europe de l’est pour ses parcs et ses réserves forestières. La forêt de Białowieża est connue comme la dernière forêt primaire d’Europe, sa partie Biélorusse1 est officiellement préservée. Ce plat pays abrite d’autres forêts primaires comme la réserve de biosphère de Berezinsky et des forêts secondaires comme le parc national de Naliboki laissé en partie à son évolution naturelle. La persistance de tels massifs forestiers est due à leur histoire, à la pauvreté des sols et à l’omniprésence de marais.

Les arbres comptent parmi les plus anciens organismes vivants de la planète. La première forêt fossile connue date de plus de 300 millions d’années alors que l’Homme n’a que 7 millions d’existence. Les réserves sauvages biélorusses sont tout à fait pénétrables, même si quasiment aucune trace d’activité humaine n’est clairement visible. Les vieux individus, ceux atteints de maladie ou affaiblis par des ravageurs (le scolyte principalement) y meurent un à un, puis chutent et sont décomposés par des insectes et des champignons. La matière organique a le temps de se dégrader et accumule énormément de carbone.

Les arbres, comme l’ensemble du règne végétal, ont fait l’objet ces dernières décennies, de découvertes scientifiques invitant à émettre l’hypothèse fascinante d’une « intelligence végétale » susceptible d’apporter des éléments de réponse à bien des défis environnementaux actuels. Par le cadrage, les vues de la série Silvaticus2 sont « concentrées sur la végétation qui forme en elle-même paysage3 ». D’une part, les photographies présentent une vision de ces sanctuaires forestiers aux fonctions écologiques majeures alors que la forêt primaire de Białowieża est en danger dans toute son étendue (Pologne et Biélorussie). De nombreux botanistes estiment que pour « sauver le climat », il convient de réduire les émissions de CO2, de laisser vieillir les forêts et d’arrêter la colonisation humaine des terres. D’autre part, ces clichés sur écrits, à travers un parcours esthétique et naturaliste (forme descriptive), tentent de dénouer les clivages arbitraires entre l’humain et les différents règnes du vivant pour renouer avec une nature non domestiquée et « pour entendre ce qui ne parle pas, mais qui n’en pense pas moins4 ».

Geoffroi Caffiery

1- La partie polonaise est menacée par l’exploitation forestière, bien que protégée par l’UNESCO depuis 1992 et l’Union européenne ;

2 – Sens du mot SILVATICUS, A, UM (adjectif) : sauvage, qui croît naturellement (racine étymologique du mot forêt) ;

3 – Michel Poivert à propos de Arnaud Claas, 50 ans de photographie française de 1970 à nos jours, Éditions Textuel ;

4 – Selon les termes de Marielle Macé (écrivaine et directrice de recherche au CNRS) ;


 

Pays : Biélorussie
Lieu : La forêt primaire de Białowieża (partie biélorusse), la réserve de biosphère de Berezinsky et le parc national de Naliboki

Nombre de photos : 40