CHILI, ZONES SACRIFIÉES

Marion ESNAULT

ESNAULT


This post is also available in: Anglais

À Tocopilla et Mejillones, en plein désert d’Atacama au nord du Chili, il fait très chaud, l’océan pacifique est tranquille et la brise marine, très agréable. La vie quotidienne est paisible. Les familles avec leurs enfants, les groupes d’adolescents, les jeunes couples ont pour habitude de passer leur temps libre sur les plages. Dans les rues des deux « pueblos », tout le monde se salue, tout le monde se connaît, il fait bon vivre. Rien ne laisse vraiment penser que ces habitants vivent dans une « Zone sacrifiée », un territoire où l’air et l’océan sont très pollués et où l’industrie prime sur la santé des gens et de l’environnement.

Tocopilla et Mejillones, qui comptent respectivement environ 25 000 et 13 000 habitants, sont deux villes côtières chiliennes, situées dans le désert le plus aride du monde. Ce sont historiquement des ports de pêches. Aujourd’hui, ce sont surtout des zones industrielles.

Engie (anciennement GDF-Suez, détenu à près de 25% par l’État français) y possède des centrales à charbon (5 unités à Tocopilla et 4 unités à Mejillones). En d’autres termes, moins techniques, la multinationale française de l’énergie possède des usines qui produisent de l’électricité grâce au charbon qu’elle importe de plusieurs pays (Colombie, Etats-Unis, etc.) par voie maritime sur d’immenses cargos.

Mejillones et Tocopilla se situent dans la région d’Antofagasta qui a le triste record du taux de cancer le plus élevé du Chili. Il n’y a pas d’études spécifiques pour connaître le taux de cancer par ville mais Marcelo, le directeur de l’hôpital de Mejillones, a mené sa propre enquête : « La première cause de consultation à l’hôpital, ce sont les problèmes respiratoires (…) nous n’avons malheureusement pas les moyens d’étudier en profondeur les causes mais il est clair que le facteur environnemental est un des facteurs qui provoquent des maladies respiratoires ».

Dans sa charte éthique, Engie « s’engage auprès des communautés dans lesquelles il exerce son activité à respecter l’environnement (…) et à minimiser son impact écologique ». L’article 19 (alinéa 8) de la Constitution politique chilienne affirme que « toute personne a le droit de vivre dans un environnement non pollué ». Sebastián Piñera, le nouveau président du Chili, dit lui-même que « les tragédies environnementales et sanitaires de Mejillones parlent davantage que mille mots ». Et pourtant, à Mejillones, Engie construit une nouvelle centrale à charbon nommée « Red Dragon » (dragon rouge).

Reportage photographique réalisé en décembre 2017 à Tocopilla et Mejillones, Région d’Antofagasta, Chili. Soutenu par l’ONG les Amis de la Terre France qui se bat depuis plusieurs années pour qu’Engie ferme ses centrales à charbon à travers le monde. Au Chili, Chile Sustentable se bat également pour la transition énergétique.

Marion Esnault

 


 

Pays : Chili
Région : Antofagasta

Nombre de photos : 29