VIETNAM et AGENT ORANGE, aujourd’hui encore…


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 Joël FELIX
2011 / 2012 – VietnamJe garde en mémoire les images des infos télévisées sur la guerre du Vietnam. À mon souvenir, ces images étaient bien plus dures que ce que l’on diffuse sur les conflits qui ravagent actuellement le monde. 

Plus récemment, en 1998, j’ai eu l’occasion d’accomplir un voyage touristique au Vietnam. En survolant certaines régions du centre du pays, j’avais été frappé par la quasi-absence de végétation à certains endroits ainsi que par les centaines de cratères qui subsistaient si longtemps après la guerre. Je me suis souvenu que les Américains avaient utilisé des défoliants pour combattre les opposants communistes du Nord-Vietnam, les Vietcongs.
Ces défoliants ont été pulvérisés à la fois pour détruire le couvert végétal abritant la piste « Hô Chi Minh », mais aussi pour anéantir les cultures, afin de mettre à genoux la population et les Vietcongs.
Le principal défoliant employé était le fameux « agent orange », à base de dioxine. Plus près de chez nous, c’est également la dioxine qui est à l’origine de la catastrophe sanitaire de Seveso.

Je ne savais cependant encore rien, à l’époque, des effets dévastateurs à long terme de la dioxine contenue dans l’agent orange. Ce n’est que plusieurs années plus tard, en tombant un peu par hasard sur le site de l’ONG allemande « Friendship Village » que je les ai découverts. Le Vietnam en est à l’heure actuelle à la troisième génération depuis la fin de la guerre américaine. Aujourd’hui encore, des enfants naissent avec un handicap mental, des malformations physiques ou les deux à la fois, à tous les stades de gravité que l’on peut imaginer.

Le Friendship Village de Hanoï est un centre d’hébergement et de revalidation d’enfants dont l’origine familiale permet de déterminer avec une quasi-certitude que le handicap dont ils souffrent trouve son origine dans la dioxine de l’agent orange, qu’il s’agisse de grands-parents ayant été dans les rangs des Vietcongs ou de simples cultivateurs dans les zones pulvérisées d’agent orange.
Dans ce centre d’hébergement et de revalidation, les enfants suivent une scolarité et une formation professionnalisante adaptées à leur handicap en vue de leur réinsertion dans la société par le travail.
Comment ne pas se sentir mal à l’aise, en tant qu’Européen, face à un tel scandale sanitaire ?  Nous qui n’avons pas levé le petit doigt pour aider le Vietnam pendant les vingt années qu’a duré l’embargo imposé par les Etats-Unis entre leur départ précipité en 1975 et la levée vers 1995 ?

Parallèlement à cette préoccupation croissante pour ce que nous avons laissé faire au Vietnam, j’ai poursuivi mes travaux pratiques de photographie noir et blanc argentique. Moi qui cherchais un thème à traiter de manière approfondie dans le mode du reportage, je l’avais trouvé.
Il m’a été très facile d’obtenir l’aval de l’organisation mère en Allemagne et de la direction locale du Friendship Village à Hanoï, où j’ai logé en juillet 2011. A mon retour, j’ai cependant constaté que je n’avais pas suffisamment de matière pour rendre compte des diverses facettes de la vie au quotidien dans un tel centre de revalidation.

Je suis donc retourné au Friendship Village place en avril 2012, et j’ai complété mon reportage par un séjour dans un autre centre de revalidation, la Thanh Tam School de Danang.
J’ai rencontré dans ces deux centres des responsables et des aidants dévoués et d’une grande humilité face à la détresse de ces enfants.
Le plus surprenant pour moi, finalement, c’est la réponse que m’a faite une institutrice vietnamienne qui ne comprenait pas très bien le but de ma présence. Lorsque j’ai essayé de le lui expliquer, elle m’a très simplement répondu : « Oui, mais tout cela, c’est de l’Histoire, maintenant ! »

Ce reportage est une initiative personnelle, entièrement financée avec des moyens personnels.
Légendes :01- La qualité de l’entourage n’enlève rien à la solitude face au handicap.
02- C’est dans l’atelier de broderie que règne la plus grande quiétude, dans le centre de revalidation de Van Canh.
03- Thi Long met la dernière main aux bouquets de fleurs artificielles qu’elle vient de terminer.
04- L’entraide est sacro-sainte.
05- Les exercices de revalidation sont souvent une récréation.
06- Une fois par mois, les enfants du Friendship Village de Van Canh reçoivent la visite de médecins militaires.
07- Long, âgé de 7 ans, passe la visite médicale mensuelle.
08- La sieste, rite quotidien sous ces latitudes
09- Mélancolie et bonne humeur coexistent en alternance.
10- Quelles peuvent bien être ses pensées ?
11- Les petits sourds-muets de la Thanh Tam School se déplacent toujours en se tenant par les vêtements.
12- La joyeuse pagaille qui prélude au départ en week-end est irrésistible.
13- Le repas, c’est toujours la fête.
14- Les ados sourds-muets nourrissent les enfants plus lourdement handicapés.
15- Fin de repas, à la cantine, lorsque l’ennui s’installe.
16- Badminton, détente de fin de journée à Van Canh.
17- Le football représente la détente sportive favorite des garçons.
18- Le joueur d’échecs – élaboration de la stratégie
19- Le joueur d’échecs – passage à l’action
20- Le joueur d’échecs – euphorie de la victoire, face à une lycéenne du monde extérieur

Photographies FÉLIX Joël