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La Fondation Yves Rocher, dans le cadre de sa campagne photographique intitulée « Au nom de la biodiversité », envoie chaque année un photo-reporter de renommée internationale à travers le monde. De 2023 à 2025, en juillet, l’Espace Frans Krajcberg reçoit trois d’entre eux, dès leur retour en France, pour partager leurs témoignages sur l’état de notre planète. Comme Frans Krajcberg, qui dès les années 1960 utilisait la photographie pour dénoncer la déforestation au Brésil, les trois reporters invités montrent les dangers qui menacent les derniers réservoirs naturels de notre Planète. Du Pantanal à la Papouasie-Nouvelle-Guinée, ils ont vécu en immersion dans ces sanctuaires protégés, où des espèces animales et végétales endémiques existent encore. Pour ce deuxième rendez-vous, nous faisons
escale en Papouasie-Nouvelle-Guinée avec Ulla Lohmann.

Dans le cadre d’une commande photographique de la Fondation Yves Rocher sur les derniers sanctuaires de la biodiversité, elle y est retournée pour documenter les bouleversements qui affaiblissent cet écosystème et mettent en danger tout un mode de vie ancestral. Des montagnes Nakanaï jusqu’aux pentes des volcans mythiques de l’archipel Bismarck, l’exposition se vit comme une véritable aventure dans des contrées lointaines. Où elle a pu s’immerger avec des ethnies qui vivent en parfaite osmose avec le monde du vivant, empruntant à la terre juste les besoins nécessaires à leur survie, offrant un culte respectueux à des divinités toutes issues de ce jardin d’Eden. « Il y a là-bas un profond respect de ce que la nature te donne », estime Ulla Lohmann, après avoir observé le quotidien du peuple Baining, ou passé du temps avec les Tolai, l’une des sociétés les plus secrètes et difficiles d’accès de la planète. Dans cette tribu, des hommes deviennent tubuan, ou Dukduk, et incarnent des spiritualités grâce à des impressionnants masques composés d’une coiffe conique, sur lesquels sont peints de grands yeux en spirales. Reste que la modernité et l’exploitation abusive des ressources naturelles sont venues perturber cet équilibre. La forêt vierge, qui représentait plus de 70 % de la surface de la Nouvelle-Bretagne, est rongée par les monocultures de palmiers à huile. Avec des conséquences désastreuses : il y a quinze ans, l’est de la Nouvelle-Bretagne était largement boisé avec plus de 98 % de sa forêt primaire intacte. Aujourd’hui, 20 000 hectares disparaissent chaque année contre 3 000 dans les années 2000. Au total, selon des ONG, la région a perdu 10 % de sa couverture forestière en deux décennies – et 60 % de cette perte concerne la forêt primaire.

Ulla Lohmann, depuis ses débuts en photographie, n’a de cesse de se battre, appareil photo à la main, pour dénoncer les outrages faits à notre environnement. Ces clichés s’avèrent un manifeste pour sauver les derniers îlots de biodiversité, mais aussi pour sauvegarder des cultures millénaires qui, autrement, finiront par s’évanouir dans le chaos du consumérisme. Une démarche qui s’inscrit dans les pas de Frans Krajcberg : lui aussi avait compris qu’il y avait urgence à protéger la vie. La nature était son atelier et son espace de ressource vitale pour l’inspiration. Vivant au plus près de la nature, se battant pour préserver la forêt amazonienne qu’il voyait se consumer jour
après jour, il avait fait de son art un acte militant, prenant pour support à sa peinture des éléments végétaux, réalisant ses sculptures à partir des bois brûlés récupérés dans des forêts calcinées, immortalisant dans ses images ces feux destructeurs des arbres de vie. La photographie, au-delà du témoignage, au-delà d’une démarche artistique, est aussi un acte militant dont Frans Krajcberg et Ulla Lohmann sont les hérauts. Pour crier la beauté et la fragilité d’une nature menacée.

Une exposition en partenariat avec la Fondation Yves Rocher qui a financé ce reportage dans le cadre de sa mission photographique intitulée « Au nom de la biodiversité : ces sanctuaires vivants à préserver ».