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La forêt murmure, abrite, veille, nous appelle, nous fascine. Plus vieille que la mémoire humaine, elle a ses propres lois. C’est une sentinelle, entre ciel et terre, dont le coeur mystérieux bat la mesure du temps, en-deçà et au-delà de la vie sous toutes ses formes.
Elle nous parle d’elle mais aussi de nous : de notre liberté, de nos émotions, nos fantasmes et nos craintes… de nos origines et de notre devenir, de ce qui nous lie à elle et au monde, en tant que vivants.
La force lente de la forêt est une altérité radicale. Elle nous dépasse, nous survit, nous précède. Elle nourrit les hommes, elle les soigne, les abrite… elle les égare et les trouble, elle les inquiète et les menace. Entre protection et étrangeté, elle est un miroir pour nos imaginaires et un lieu d’affects puissants.
Le philosophe Emanuele Coccia dit que c’est en regardant les arbres que l’on devient humain. Forêts trop humaines fait droit à ces tentatives contemplatives pour élargir notre humanité : traverser la forêt, c’est aller à la rencontre de nos propres métamorphoses.
La persistance des arbres immobiles, touchant le ciel par dessus les siècles, ne cesse de nous étonner. Capables d’adaptation dans les environnements les plus hostiles, ils possèdent une vie intense et sereine, surhumaine, admirable et parfaitement intelligente.
Sauvages, intactes, fières et enracinées, les forêts résistent à nos existences mondialisées. Elles font entendre une alternative possible à ce monde impatient parcouru par le spasme des crises sociales, économiques et écologiques.

Yana O’Connell